Les années de thèse

 

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point de départ

 

Au début de l'année 1968 il a fallu s'intéresser à trouver du travail. IL y avait un panneau d'affichage avec les différents postes proposés par les entreprises.

 

Il y avait entre autre deux poste de doctorant aux Etats Unis, qui nous intéressaient mais la famille n'était pas très enthousiaste.

Il y avait aussi des postes au Commissariat à l'Energie Atomique, dont un à la Sorbonne et un autre à Fontenay aux Roses dans l'un des centres du CEA. 

 

La période était un peu animée car on s'approchait de mai 68. Nous nous sommes finalement décidés pour les postes proposés par le CEA.

Comme nous avions fait auparavant un stage d'été à Saclay cela a probablement facilité les choses.

 

Le démarrage du projet

 

Le Laboratoire de Chimie des Solides dirigé par le professeur Jean Amiel n'était pas très grand; son accès était d'ailleurs assez déroutant. Il y avait en gros deux équipes de chercheurs, dont une dirigée par Michel Figlarz, qui était alors Maître Assistant. Les deux équipes ne s'aimaient pas.

 

L'après mai 68 a conduit à l'éclatement de l'Université de Paris en plusieurs établissements et notamment deux universités scientifiques : Paris 6 et Paris 7. Les chercheurs du laboratoire se sont répartis entre les deux universités et Michel Figlarz à rejoint la toute nouvelle Université d'Amiens.

Dans le même temps la Sorbonne a été réorganisée et les laboratoires de Chimie ont été transféré dans les nouveaux locaux de la Halle aux Vins. Pour simplifier le tout j'ai fait mon service militaire en 1970; ce fut à Paris au Service des Poudres, situé Quai Henri 4. 

Autant avouer tout de suite que les 3 premières années de thèse ont été passablement perturbées, sachant que le contrat avec le CEA avait une durée maximum de 5 années.

Le Laboratoire de Chimie des Solides du Pr Amiel  se consacrait en fait à l'étude des solides pulvérulents et une équipe avait des projets en cours sur l'hydroxyde de cobalt. Michel Figlarz avait réussi à convaincre des amis du CEA de financer une thèse sur l'hydroxyde de Nickel. Il pensait, qu'il suffirait de reproduire les mêmes études que celles faites sur l'hydroxyde de cobalt.

 

Un laboratoire modeste en 1968

 

A mon arrivé l'outil le plus utilisé était un appareil de diffraction des rayons X adapté à l'examen des poudres, un apparail assez rustique pour l'analyse thermogravimétrique puis un vieux microscope électronique donné par le CNRS., autrement dit pas grand chose quand on voit ce dont disposent aujourd'hui les laboratoires.

La pièce essentielle du laboratoire était cependant un autoclave qui permettait de réaliser des traitement sous haute température (et sous atmosphère comme on le verra).

 

Un mauvais départ

 

L'aventure a tout de suite mal commencé. L'hydroxyde de cobalt finement divisé est obtenu par simple addition d'une solution alcaline sur une dissolution d'un sel de cobalt. Le produit obtenu se présente sous la forme de paillettes; il suffit de le sécher pour l'analyser.

 

Dans le cas du nickel c'est une autre affaire. On récupère en effet une sorte de boue de couleur verte. 

 

Le produit, même lavé, reste bien loin de la structure cristalline attendue. On se retrouve plutôt dans le cas des argiles. 

 

Du coup  il a fallu s'adapter.

Pour qualifier le produit j'ai emprunté à un chercheur américain, M. Warren, le qualificatif de "turbostratique". De même nous nous sommes rapprochés de Jean Méring de l'Université d'Oréans, spécialiste des argiles.

Enfin Louis Néel, prix Nobel de Physique (1970) a bien voulu mettre à notre  disposition sa connaissance du magnétisme.

 

Les années suivantes ont été consacrées à l'examen de cette boue, qui a été triturée de diverses manières: le traitement dans un autoclave sous atmosphère d'azote ou d'hydrogène, soit en dispersion dans l'eau soit dans du méthanol ou du dimétylsulfoxide, ces deux derniers produits étant miscibles dans l'eau ou des solvants. 

 

Bien évidemment le produit, une fois séché, est examiné par diffractionX, microscopie électronique, infrarouge, thermogravimétrie. Le seule chose que je n'ai pas faite est l'analyse chimique du produit. C'est probablement une erreur.

 

Cela part dans tous les sens

L'hydroxyde de nickel cristallisé se présente sous la forme de feuillets, dont on connait exactement l'écartement. Le résidu sec que j'ai obtenu, contient les mêmes feuillets mais leur écartement est variable, soit par inclusion d'eau, soit par greffage de chaînons organiques. Dasn le cas du DMSO on a un comportement différent difficile à déterminer.

 

Bien évidemment le Pr Néel nous a aidé en vérifiant les propriétés magnétiques des produits transformés. On était à deux doigts de séparer les feuilles de l'hydroxyde de nickelet de passer d'une structure anti-ferromagnétique à une structure ferromagnétique.

 

Il a malheureusement fallu s'arrêter car il ne restait plus qu'une année pour terminer la thèse.

 

Entretemps 7 articles ont été rédigés, dont un pour répondre aux critiques exprimées par des chercheurs allemands.

La rédaction de la thèse a pris un an

La multiplicé des informations collectées a mis en évidence des besoins d'aller plus loin mais il ne restait plus assez de temps.

Comment choisir parmi les différents aspects rencontrés?

Se contenter de traiter l'évolution de la  structure microscristalline?

Insister sur les propiétés magnétiques ?

 

Par ailleurs il n'y avait pas encore de traitement de texte ni de photoshop. Il fallait tout dessiner à la main, assembler les exemplaires, rédiger les derniers articles...

La thèse a finalement été soutenue début 1974

En principe pour soutenir une thèse il faut réunir un jury dans lequel on doit trouver au moins un professeur de l'Université où on est inscrit en plus du président du jury.

 

Jean Amiel a été le président, 

André Authier, professeur de crystallographie a bien voulu le rejoindre

Il y a eu bien évidemment Michel Figlarz, devenu professeur à Amiens et Louis Néel (prix nobel 1970), qui est venu de Grenoble. 

Ce dernier a bien voulu développer à ma place les conclusions auxquelles il était parvenu et détailler notamment les points sur le magnétisme qui m'étaient pas familiers.

Il y a un regret, celui de ne pas avoir réussi à convaincre Georges Champetier, directeur de l'ESPCI, de bien vouloir rejoindre les autres membrres du jury mais cela a tenu vraisemblablement à la présence dans le jury de Louis Néel, prix Nobel.

 

Un grave problème de communication

Comme le produit identifié s'apparentait à une argile j'ai utilisé pour le qualifier un adjectf créé par M. WARREN : turbostratique.  

 

J'étais loin d'imaginer que cet hydroxyde d enickel turbostratque allait servir de point de départ à autant de travaux, essentiellement d'ailleurs sur les batteries .

Il y a quelques années des chercheurs canadiens ont publié une rétrospective des travaux sur l'hydroxyde de nickel; ils ont recensés 293 articles provenant de plusieurs laboratoires, notamment Chine et Inde. Je suis cité 4 fois. 

 

Cependant le qualificatif "turbostratique" a rapidement disparu pour céder la place à la lettre grecque "alpha", l'hydroxyde normal (cristallisé) se contentant de la lettre "béta".

 

Il est vrai que peu de gens sont remontés à M. WARREN, qui est venu assister à une conférence à Marseilles en 1971.

Il y avait bien ce laboratoire de Polytechnique qui l'utilisaint encore en 1990 mais c'était à peu près tout. 

 

Les moteurs de recherche (ou l'IA auhjourd'hiu) ne font pas la liaison entre "turbosrtatique" et "alpha". 

 

Trouver un qualficatif accrocheur est difficile; c'est le rôle des spécialstes du Marketinget dans les universités il n'y en a pas beaucoup.